Ai-je des TCA ?
Certains signes ou comportements chez vous s'apparentent à ceux d'un trouble du comportement alimentaire ? Vous êtes sûr d'avoir un trouble mais vous ne savez pas duquel vous souffrez ?
Un TCA, c'est quoi ?
Pour bien comprendre ce qu'est un trouble des conduites alimentaires (TCA), Marie-Eugénie, notre psychologue spécialiste de ces troubles nous explique ce que c'est.
Bonjour Marie-Eugénie, peux-tu nous dire ce qu’est un TCA ? Est-ce que c’est une maladie ?
Les troubles du comportement alimentaire ne sont pas des maladies. En psychologie, on parle rarement de maladie.
On va plutôt dire “trouble” ou “pathologie”. Dans notre manuel de référence, les TCA sont donc codifiés comme étant des troubles.
C’est un ensemble de comportements alimentaires qui vont avoir des impacts graves sur la santé physique des personnes touchées ainsi que sur leur santé mentale. Les troubles de l’alimentation sont liés à une gestion difficile des émotions.
C’est un trouble du comportement à part entière comme il en existe d’autres, on peut citer par exemple des troubles des conduites à risques, des troubles du sommeil, des troubles sexuels, etc.
Le trouble de l’alimentation peut se développer seul ou être associé à d’autres pathologies, à des états passagers ou chroniques. Il peut aussi être associé à des traits de personnalité ou à des troubles de la personnalité borderline ou des conduites à risques multiples. Il n’y a pas vraiment de règle.
Les troubles du comportement alimentaire sont ensuite divisés en plusieurs catégories désormais bien connues par le grand public comme l’anorexie mentale, la boulimie et l’hyperphagie, tandis que d'autres troubles apparaissent tels que l'orthorexie, qui sous couvert d'un régime alimentaire sain, traduit en réalité une véritable obsession pour une alimentation parfaite.
Quels sont les principaux symptômes d’un trouble alimentaire ?
Il existe beaucoup de symptômes qui varient en fonction de la pathologie dont la personne souffre.
Certains sont propres à l’anorexie ou à la boulimie, mais globalement une personne qui a des TCA va développer un certain nombre de comportements :
- Un refus de s’alimenter ou une alimentation trop importante par rapport à ce dont elle a besoin.
- Une obsession liée à l’image de son corps : la personne va se trouver trop grosse ou trop maigre par exemple.
- Le fait de s’imposer un régime alimentaire strict : supprimer certains aliments par peur de grossir ou parce que c’est considéré comme mauvais pour la santé.
- Le fait de ne plus vouloir participer aux repas de famille.
- Des comportements compensatoires comme se faire vomir, prendre des laxatifs, faire du sport à outrance après un repas…
- Une alimentation cachée : manger la nuit en cachette ou planquer de la nourriture dans sa chambre par exemple.
- Une prise de poids ou au contraire un amaigrissement.
- Des sautes d'humeurs.
- Des pesées fréquentes : certains troubles alimentaires traduisent un besoin de contrôle sur le poids, donc les personnes peuvent se peser plusieurs fois par jour.
Libérez-vous des chaînes du trouble du comportement alimentaire !
Cette fiche vous aide à retrouver une relation saine avec la nourriture et votre corps. Découvrez comment retrouver l'harmonie intérieure et cultiver une image corporelle positive.
Quel est le nombre de personnes touchées par les TCA ?
Le nombre de personnes qui souffrent d’un TCA est assez considérable : 8,4% des femmes et 2,2% des hommes sont touchés par les troubles du comportement alimentaire.
On estime que 20% des femmes et 14% des hommes connaîtront un jour un épisode modéré d’un trouble des conduites alimentaires, bien que les chiffres concernant les hommes soient à mon sens biaisés étant donné que les troubles alimentaires sont souvent perçus comme quelque chose de plutôt féminin et que les hommes sont plus difficilement diagnostiqués comme ayant un trouble de l’alimentation.
La société attribue plus facilement les problématiques d’amour de soi, d’image corporelle, d’estime de soi, à des femmes plutôt qu'à des hommes, pourtant, nombreux sont les hommes qui développent un TCA pour ces raisons.
Certains jeunes garçons souffrant d’anorexie ou de boulimie vont par ailleurs plus facilement rester dans le déni car eux-mêmes ont intégré l’idée que les troubles alimentaires étaient réservés aux femmes.
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À partir de quel âge peut-on développer un trouble alimentaire ?
Même si on a tendance à penser que les troubles alimentaires apparaissent souvent à l’adolescence (ce qui est vrai), ils peuvent en réalité se développer à n’importe quel âge : même les enfants peuvent en développer.
Une anorexie peut se développer très jeune, on parlera d’anorexie infantile ou d’anorexie du nourrisson par exemple, et les symptômes sont proches de ceux qu’un adolescent peut développer.
De la même manière, il existe aussi des troubles des conduites alimentaires chez les personnes âgées qui vont refuser de manger, surtout quand elles sont isolées ou quand elles subissent un choc émotionnel.
Finalement, et même si certains troubles tels que la boulimie apparaissent plus facilement à l’âge adulte, personne n’est à l’abri de développer à un moment ou à un autre de sa vie, un trouble du comportement alimentaire.
Est-ce que souffrir d’un TCA, c’est dangereux ?
Oui, les TCA peuvent être dangereux. Ils sont si sérieux qu’ils sont considérés comme des addictions sans drogues.
Le comportement face à l’alimentation échappe à la volonté de la personne, qui, généralement, présente un terrain propice au développement pathologique de son trouble : mauvaise estime de soi, amour de soi au plus bas, environnement stressant, déprime, dépression, deuil, harcèlement scolaire, etc.
Tous ces éléments peuvent rapidement devenir des déclencheurs d'un trouble de l'alimentation. Dans les cas les plus graves, certaines personnes aux prises d'un TCA décèdent.
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Bon à savoir
Selon l'INSERM, 5 à 6 % des personnes souffrant d'anorexie mentale chronique meurent.
Quelles sont les conséquences d’un trouble des conduites alimentaires ?
Il y a d’importantes conséquences au niveau du rapport au corps et de l’image de soi.
Les TCA sont vraiment en lien avec l’estime de soi. Le trouble du comportement alimentaire traduit un mal-être et ajoute une charge mentale très importante à la personne qui le subit.
Le quotidien de cette personne devient soumis au trouble de l’alimentation et il y a des impacts dans les relations amoureuses, les relations familiales, la vie professionnelle… Les TCA sont un fardeau.
D’autres conséquences sont par ailleurs moins connues. Le TCA a aussi un impact sur la confiance en soi, l’amour de soi, et tout le fonctionnement cognitif : une personne qui fait de l'anorexie a plus de mal à se concentrer dans les périodes de fortes restrictions.
Des variations émotionnelles très importantes apparaissent, puisque le fait d’imposer un rythme alimentaire difficile à son corps influe grandement sur la gestion des émotions. Il y a beaucoup d'irritabilité et de débordements émotionnels. Des troubles du sommeil peuvent aussi survenir.
Les conséquences des TCA sont multifactorielles car ils sont présents dans toutes les sphères de la vie. Ils peuvent aussi conduire à d’autres conduites addictives comme la consommation de substances illégales ou les comportements dangereux.
Est-ce que les troubles du comportement alimentaire sont un mécanisme de défense ?
D’une certaine manière, oui. C’est un trouble à part entière donc il y a beaucoup de choses en jeu dans le développement d’un TCA.
Les TCA sont en lien avec une problématique de contrôle, de lâcher prise, donc c’est un moyen pour la personne de se sentir protégé et en sécurité. La personne reprend le contrôle de quelque chose de très visible : son corps.
Dans le cas de la boulimie par exemple, c’est plutôt un mécanisme de réassurance. La personne calme ses émotions avec la nourriture. Après sa crise TCA, elle ressentira une grande culpabilité qui la poussera à compenser, soit en vomissant, soit en faisant du sport intensément, soit en ayant des restrictions alimentaires.
Pour l’hyperphagie, c’est une façon de se rassurer mais aussi de se punir. La personne qui fait des crises TCA d’hyperphagie ressent un vide intense et mange pour se rassurer, se combler, mais aussi pour se punir.
Les TCA apparaissent donc comme une forme de mécanisme de défense puisqu’ils permettent à la personne de calmer ses angoisses et de se protéger.
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Pourquoi les TCA sont encore tabous ?
Les TCA sont encore très tabous socialement parlant parce qu'ils sont difficilement compréhensibles par ceux qui ne les vivent pas.
Les gens ont du mal à comprendre pourquoi quelqu’un pourrait volontairement se restreindre de nourriture ou pourquoi quelqu’un aurait des difficultés à accepter son propre corps.
Un trouble de l’alimentation existe car il y a un manque, des blocages, des traumatismes, des ressentis… Peut-être que des abus ont existé dans le passé, il y a des milliers de raisons difficilement compréhensibles pour l’extérieur.
Le trouble alimentaire apparaît aussi comme quelque chose de dégoûtant pour les autres. Le dégoût est une émotion qui se développe dans chacun d’entre nous pour nous éviter de reproduire des expériences nocives et/ou négatives pour nous. C’est pour cette raison que des non-dits existent autour des TCA.
Il y a aussi un gros enjeu autour de l’image du corps. Notre société met en avant les corps minces et lisses par période, puis va fantasmer sur des corps plus pulpeux, puis va revenir sur des idées d’acceptation de soi par période. Ces alternances véhiculent des images du corps faussées.
Une personne qui est influencée par les images qu’elle reçoit va tenter d’y ressembler pour se faire accepter et s’accepter.
Ai-je des TCA ?
Certains signes ou comportements chez vous s'apparentent à ceux d'un trouble du comportement alimentaire ? Vous êtes sûr d'avoir un trouble mais vous ne savez pas duquel vous souffrez ?
Quels sont les préjugés qui reviennent le plus sur les troubles de l’alimentation ?
Préjugé N°1 : Les TCA impliquent toujours des vomissements
Le fait de se faire vomir n’appartient qu'à un certain type de TCA et il s’agit d’un comportement compensatoire qu’on retrouve uniquement dans certains cas comme l'anorexie par exemple ou les crises de boulimie.
Il ne s’agit pas d’un signe évident d’un trouble du comportement alimentaire restrictif ou évitant.
Préjugé N°2 : On peut sortir d’un trouble de l’alimentation avec de la volonté
De manière générale, les gens pensent qu’il suffit de le vouloir pour stopper son TCA. C’est un préjugé complètement faux.
Le trouble du comportement alimentaire est tout un système de croyances qui s’ancre petit à petit et qui biaise l’image de soi, l’estime de soi, et le rapport au corps.
Ce n’est pas aussi simple que d'arrêter de manger, de manger équilibré ou de manger en plus grande quantité pour aller mieux.
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Les troubles des conduites alimentaires impliquent la mémoire du corps, alors le temps est une composante essentielle pour la guérison. Par exemple, une personne ayant été anorexique pendant un an, va sûrement mettre un an pour en sortir totalement.
Préjugé N°3 : Les troubles du comportement alimentaires sont toujours visibles
De manière générale, les gens imaginent un anorexique avec un poids faible et une santé physique très faible. Ils imaginent un hyperphagique avec un surpoids, du diabète ou du cholestérol. Ils imaginent un boulimique avec les yeux jaunes, etc.
Parfois, ils imaginent aussi que les personnes souffrant d’anorexie ont aussi d’autres conduites addictives comme l’addiction à la cigarette ou à l’alcool.
Même s’il existe des “patterns”, tous ces préjugés sont bien évidemment faux. En réalité, une personne qui possède une corpulence qui n’interpelle pas forcément et/ou un mode de consommation en apparence tout à fait sain peut en réalité être victime d’un TCA très sévère.
Quels rôles jouent la culpabilité et la honte dans un trouble de l'alimentation ?
Dans les TCA, la honte et la culpabilité viennent entretenir les troubles, en prenant toute la place. Ces sentiments surviennent souvent pendant et après les crises alimentaires et participent à l'entretien des fausses croyances que la personne cultive en elle.
Tout d’abord, les TCA sont des troubles cachés. Il est rare qu’un proche puisse voir de ses propres yeux un trouble du comportement alimentaire.
La honte envahit les personnes qui en sont victimes : elles vont manger en cachette, se faire vomir à l’abri des regards, faire du sport à outrance dans le dos de leurs proches. Tout est caché pour garder cette idée de quelque chose qui leur appartient et qui les apaisent.
Il y a aussi énormément de honte face au fait que le TCA est très tabou et tabou dans l’image que l’on en a. Les personnes ont honte d'être soumises à ce trouble du comportement alimentaire.
Pour la culpabilité, encore une fois, elle est omniprésente : c’est l’émotion qui est responsable du maintien du cercle vicieux.
Quand une personne entre en crise TCA et que la crise se termine, le sentiment de culpabilité se manifeste et cette culpabilité, inconsciemment, va valider les pensées automatiques qui conduisent à cette crise TCA.
Est-ce qu’un homme peut développer des TCA ?
Oui, il n’y a aucune différence entre un homme ou une femme. Il n’y a pas de maladie alimentaire plus identifiée chez l’homme ou chez la femme, que ce soit l’anorexie mentale l’hyperphagie boulimique, l’orthorexie, etc.
Les manifestations sont les mêmes : mêmes comportements, mêmes schémas de pensées, mêmes difficultés. S’il est souvent pensé qu’un homme ne peut pas souffrir d’un trouble alimentaire, c’est à cause de la façon dont l’extérieur se comporte et voit le trouble de l’alimentation, jugé comme une problématique plutôt féminine.
Certains tentent de mettre des chiffres statistiques hommes-femmes mais en réalité, pour moi, les chiffres seront toujours biaisés car les TCA sont moins diagnostiqués chez les hommes.
D’abord car les hommes consultent moins les professionnels de santé, ils gardent le silence, et ont du mal à mettre des mots sur leur mal-être.
Ensuite, parce qu’il faut le dire, certains professionnels de santé, pas forcément spécialistes des troubles du comportement alimentaire, ne vont pas penser spontanément à un trouble de l'alimentation ou une crise des conduites alimentaires lorsqu’ils font face à un homme avec une corpulence très mince.
Anorexie, boulimie, hyperphagie et orthorexie : de quoi parle-t-on ?
Afin de mieux comprendre les différents types de troubles alimentaires qui existent, Marie-Eugénie nous explique chacun de ces différents troubles.
Peux-tu expliquer ce qu’est l’anorexie mentale ?
L’anorexie est un trouble du comportement alimentaire qui se manifeste par des comportements de restrictions et des comportements compensatoires.
Dans le cadre d’une anorexie la personne va donc, dans une période de restriction, se priver de nourriture, et dans une période de compensation, avoir des comportements tels que des vomissements ou une activité physique intense.
Il y a aussi des comportements de contrôle comme des pesées après chaque repas, ou encore un comportement rigide face à l’alimentation avec des aliments bannis. Il y a aussi un contrôle du corps avec un examen minutieux de son corps parfois quotidiennement.
En réalité, ce trouble est en lien avec le relationnel, son rapport aux autres, son rapport au corps, et le contrôle. Quand une personne anorexique a l’impression de perdre pied dans sa vie, c'est à ce moment que sa crise TCA va ressortir. Elle va se rassurer à travers ce comportement.
Finalement, on retrouve dans l’anorexie des blessures d’abandon, des angoisses de rejet, une façon de ne pas présenter de caractères d’appartenance à un sexe pour d’autres, avec un corps maigre, sans forme, et donc plutôt androgyne.
Pour d’autres encore, notamment chez les femmes, l’anorexie peut aussi être la manifestation de blocages dans l’intimité et de blocages dans le rapport à l’évolution du corps.
Quelles sont les causes les plus fréquentes de l’anorexie ?
Les causes de l'anorexie sont multiples et souvent en lien avec une grosse angoisse d’abandon et/ou une angoisse de rejet.
Parfois, l’anorexie provient d’événements traumatiques en lien avec le corps et de ce fait, une faible estime de soi. Il est aussi fréquent de retrouver, dans l’entourage proche de l’anorexique, un parent, un grand-parent, un oncle, atteint lui aussi d’un TCA.
Les repas de famille ont pu alors susciter chez l’enfant ou l’adolescent des questionnements au niveau du rapport à la nourriture.
Dans la plupart des cas, l’anorexie est la résultante d’une difficulté à accepter son corps. Pour certains, c'est une difficulté à voir son corps grandir et se développer, souvent parce que ce corps a subi de la maltraitance, qu’elle soit physique ou sexuelle.
Pourquoi il y a un besoin de contrôle dans ce trouble alimentaire ?
Pour beaucoup, l’anorexie est aussi un moyen de reprendre le contrôle. Dès que la personne anorexique a la sensation de perdre le contrôle sur son environnement, elle tente de reprendre ce contrôle à travers son corps et son alimentation.
Dans le même acabit, il y a aussi une volonté de blesser son corps parce qu’on le sent facilement. Ne pas manger provoque des sensations corporelles très intenses, rapidement.
D’ailleurs, au début de l'anorexie, la personne va perdre du poids très rapidement, et c’est une façon pour elle de se valoriser à travers la mise en place de ce contrôle “facile” et “rapide”. Sauf qu’avec le temps, le corps maigrit moins vite, et la personne se retrouve alors dans sa frustration initiale, une insatisfaction très intense.
C’est un cercle vicieux qui mène, petit à petit, à des états physiques très peu supportables dont les conséquences sont parfois irréversibles. Souvent, l’anorexie est aussi une manière de montrer aux autres qu’il existe une grande souffrance, par ce corps amaigri et meurtri.
Quelle est la conséquence principale de cette pathologie ?
La dysmorphophobie est la première conséquence de l’anorexie.
C'est le fait de voir son corps déformé, de le voir plus gros qu’il ne l’est réellement. Quand on demande à un anorexique comment il se trouve, il ou elle répondra souvent “trop gros”.
En dehors de cette particularité, les conséquences physiques de l’anorexie sont désastreuses. De l’épuisement, de la fatigue, la peau qui jaunit, ou encore des douleurs à l’estomac très importantes lorsque la personne s’alimente un peu.
On peut aussi citer des problèmes intestinaux, qui peuvent devenir dramatiques, ou encore des chutes de cheveux et une pilosité plus conséquente.
Enfin, la personne va avoir moins de capacités physiques, une perte ou une augmentation de la libido, avec soit, une sexualité qui devient inexistante, ou au contraire, une sexualité très développée avec des comportements à risque.
Est-ce qu’un homme peut souffrir d’anorexie mentale ?
Oui, il n’y a aucune différence entre un homme ou une femme vis-à-vis de l’anorexie ou des TCA en règle générale, les troubles restent les mêmes.
Les hommes sont aussi touchés par l’anorexie, c’est un fait, mais elle est moins visible que chez la femme, car pour un homme, on va avoir tendance à penser qu’il s’agit de sa morphologie naturelle.
Pourtant, l’homme présente les mêmes comportements de restrictions, de contrôle et les mêmes comportements compensatoires que la femme. Les symptômes de l’anorexie chez les hommes sont également les mêmes.
La différence se trouve surtout dans la considération et la reconnaissance du trouble chez l’homme.
Les TCA sont beaucoup moins acceptés socialement pour eux, car on attribue plus facilement aux femmes les problématiques de rapport au corps, d’amour de soi, d’estime de soi… Ce n’est pas l’image que l’on se fait de “l’homme fort” dans la société.
Les hommes sont également touchés par la boulimie.
Comment la boulimie est-elle diagnostiquée ?
Pour qu’une personne soit diagnostiquée boulimique, le manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux retient un certain nombre de critères sur lesquels les professionnels de la santé peuvent s’appuyer :
- L’absorption rapide d'une quantité de nourriture largement supérieure à ce que la plupart des gens mangeraient dans une période de temps similaire et dans les mêmes circonstances ;
- Un sentiment de perte de contrôle sur le comportement alimentaire pendant la crise (avec par exemple, le sentiment de ne pas pouvoir s'empêcher de manger ou de ne pas pouvoir contrôler le type de nourriture ou la quantité) ;
- Les crises se répètent à raison d’au moins une fois par semaine depuis 3 mois ;
- La personne met en place des comportements compensatoires : jeûne, vomissements, prise de laxatifs ou une activité physique très importante.
Pourquoi la boulimie se développe chez une personne ?
La boulimie est un trouble du comportement alimentaire qui se développe sous le coup du manque. C’est souvent un manque affectif d’ailleurs qui est évoqué comme à l'origine du trouble boulimique.
La nourriture apparaît alors comme quelque chose de réconfortant. La personne se réfugie dans la nourriture lors de ses crises alimentaires pour se rassurer, combler le manque et combler le vide affectif.
Elle se développe vraiment à toute période de la vie, elle peut apparaître à l’adolescence, lorsqu’on recherche les limites du corps, mais aussi beaucoup plus tardivement.
Je dirai que le plus grand préjugé est de croire qu’il s’agit d’un trouble réservé aux jeunes femmes, mais il n’y a pas de règles sur l'âge de l’apparition ou sur le sexe. Le trouble boulimique est vraiment en lien avec la gestion des émotions.
Que se passe-t-il après une crise de boulimie mentale ?
Une fois que la crise est passée (elle peut durer de quelques minutes à quelques jours), un sentiment de culpabilité énorme envahit la personne, et elle va penser à des choses telles que “je n’ai pas réussi à me contrôler" ou encore “je me suis laissé déborder”.
Cette culpabilité pousse la personne boulimique à mettre en place des comportements compensatoires ou des comportements de contrôle.
Ces comportements peuvent être des pesées régulières, une activité physique très intense, ou encore un contrôle de l’alimentation très rigide après une crise.
Les personnes boulimiques entretiennent leur TCA en mettant en place des comportements compensatoires et de contrôle entre chaque crise. Finalement, ce contrôle devient obsessionnel et fait revenir plus rapidement les prochaines crises.
Quelles sont les différences entre la boulimie et l'hyperphagie ?
L’hyperphagie se caractérise par des crises alimentaires compulsives, mais la personne qui en souffre ne va pas adopter des comportements de purge pour évacuer la nourriture avalée comme c’est le cas pour la boulimie vomitive. Il s’agit vraiment de deux troubles alimentaires distincts.
On peut noter 6 différences entre l’hyperphagie et la boulimie :
- L’hyperphagie boulimique se manifeste principalement sous forme de crises compulsives.
- Lors d’une crise, les émotions prennent le dessus et la personne se retrouve dans une détresse intense, détresse qu’elle ne peut soulager qu'à travers l’ingestion de nourriture en très grande quantité.
- Une fois que la crise est terminée, la personne se sent honteuse et coupable mais n'adopte pas de comportements compensatoires comme c'est le cas avec la boulimie. En effet, contrairement à une personne boulimique, la personne hyperphagique ne tente pas de se restreindre d’un point de vue alimentaire, ni de se faire vomir pour se purger et contrôler son poids.
- La personne est constamment dans une anticipation du retour de la prochaine crise, et elle en souffre grandement.
- La personne ne voit pas d’issue à cette situation, à la fois parce qu'il lui semble impossible de résister quand l'envie prend le dessus, mais aussi parce que la prise de poids affecte son estime d'elle-même.
- C’est un fonctionnement automatique, encore en lien avec une difficulté à verbaliser ses émotions et ses ressentis.
Qu’est-ce que l’orthorexie ?
L’orthorexie est un trouble qui n’est pas encore référencé dans le manuel diagnostic et statistiques des troubles mentaux, mais qui progresse dans la société, notamment par la voie des réseaux sociaux, où beaucoup de posts font l’éloge des corps parfaits, lisses et en parfaite santé, l’éloge du “manger sain” “bio” et “vert”.
On peut définir l’orthorexie comme une véritable obsession pour l’alimentation saine, au point que la personne va s’interdire de manger certains aliments qu'elle considérera comme toxiques pour elle. Elle va adopter des comportements comme le jeûne par exemple, en pensant bien faire pour sa santé.
Malgré le fait que l’orthorexie ne soit pas encore reconnue comme faisant partie des TCA, elle se développe par une peur - devenue obsessionnelle - d’empoisonner son corps, de mettre sa santé en danger.
Dans le cadre de l’orthorexie, la nourriture saine occupe toute la pensée de la personne, jusqu’à avoir des conséquences directes sur sa santé physique et mentale.
Quels sont les symptômes d’une personne orthorexique ?
- Vous avez besoin d’évaluer vos aliments et leur composition en permanence ;
- Vous avez une peur intense d'être malade après avoir consommé quelque chose qui n’entrait pas dans votre “bonne” liste alimentaire ;
- Vous avez des préoccupations importantes concernant la nourriture ;
- Vous ne prenez pas de plaisir à déguster vos repas ;
- Vous vous punissez après un écart ;
- Vous êtes en état de malnutrition ;
- Vous avez la sensation d'être supérieur aux autres d’un point de vue moral, grâce à ce mode de vie.
Quelles sont les origines de ce trouble alimentaire méconnu ?
De manière générale, le trouble orthorexique débute sur le même schéma que les autres troubles alimentaires restrictifs ou évitants.
La personne cherche à garder le contrôle de son image corporelle.
Ici il s’agit aussi de vouloir prendre soin de sa santé, en effectuant un contrôle assez strict de son alimentation. La nourriture est perçue un peu comme un médicament, sa consommation se faisant uniquement pour prendre soin du corps, tandis que la prise de plaisir n’existe pas pendant les repas.
Petit à petit, la personne perd sa liberté décisionnelle par rapport à la nourriture. Les amis, les proches, la famille, sont rapidement mis à l’écart pour éviter les repas qui imposeraient de manger des aliments “mauvais”.
Dans certains cas, c’est l’entourage qui préfère s’éloigner, en raison des nombreuses sollicitations que la personne orthorexique a à leur égard, pour tenter de les convertir à ce mode de vie qui, selon elle, est beaucoup plus sain.
Est-ce que l’orthorexie peut se soigner ?
Oui, il est possible de sortir de ce TCA. Pour soigner l’orthorexie, vous pouvez être accompagné par une équipe pluridisciplinaire parce que, comme tous les TCA, suivant la gravité du trouble, la personne peut avoir besoin de faire appel à un psychologue, à un psychiatre, à un nutritionniste…
Il est essentiel, au moindre doute, de consulter un psychologue spécialiste des troubles du comportement alimentaire pour poser un diagnostic fiable, qui permettra de débuter une thérapie ou un suivi efficace.
Quoi qu’il en soit, l’orthorexie est un trouble qui se soigne comme un autre, et il est possible d’en sortir avec l’aide d’un thérapeute.
Ai-je des TCA ?
Certains signes ou comportements chez vous s'apparentent à ceux d'un trouble du comportement alimentaire ? Vous êtes sûr d'avoir un trouble mais vous ne savez pas duquel vous souffrez ?
Comment soigner un TCA ?
Maintenant que nous avons vu quelles étaient les différentes formes de TCA et qu’ils touchent autant les hommes que les femmes, Marie-Eugénie nous explique comment une personne peut guérir des troubles de l’alimentation.
Comment sortir d’un trouble du comportement alimentaire définitivement ?
Je dirais dans un premier temps que démarrer une thérapie avec un psychologue spécialisé en thérapies cognitives et comportementales (thérapie TCC) est le meilleur moyen d’engager un traitement pour sortir d’un TCA.
Identifier le schéma dans lequel est enfermée la personne est le meilleur moyen de comprendre comment se manifeste son trouble du comportement alimentaire, parce qu’un trouble de l’alimentation se manifeste toujours d’une façon très précise.
La thérapie cognitivo-comportementale permet d’identifier les situations dans lesquelles la personne est en crise face à son TCA que ce soit pour de l’anorexie, de l’hyperphagie, de la boulimie ou de l’orthorexie, tout fonctionne de la même manière.
On identifie aussi les pensées automatiques qui s’imposent et les émotions qui sont présentes pendant la crise TCA.
On va aussi mettre en exergue le comportement mis en place par la personne, pour répondre à cette situation, ses pensées et ses émotions. Cela permet donc d’identifier le cercle vicieux dans lequel la personne est coincée.
Ensuite, il s’agit de modifier ces comportements en travaillant dessus.
De son côté, la personne prend conscience de son fonctionnement et de la façon dont se manifeste son trouble, et elle peut donc, dans un second temps, travailler sur l’origine de son trouble, soit avec son psychologue TCC, soit en élargissant la prise en charge avec un psychologue d’orientation intégrative, EMDR, ou encore un psychologue formé à l’hypnose.
Il convient à chacun de trouver la prise en charge à long terme qui lui convient le mieux.
Pourquoi consulter un psychologue pour son TCA ?
La première des raisons pour lesquelles on conseille de consulter un psychologue spécialiste des troubles du comportement alimentaire, est simple : le psychologue va aider la personne à comprendre le fonctionnement de son TCA, à comprendre ses origines et à comprendre l’impact de ce TCA.
Consulter un psy est intéressant car en réalité la personne qui exprime un trouble de l'alimentation a conscience qu’il existe une difficulté à contrôler son rapport à la nourriture.
Elle l’expliquera toujours en disant “c’est plus fort que moi”, “je perds pied” ou “je ne réussis pas à investir mon environnement” et rapporte souvent que la nourriture lui apporte un sentiment de réassurance, ou un sentiment d’apaisement après une grande colère.
En consultant un psy, la personne pourra se sentir plus en sécurité et plus en confiance pour parler de cela à une personne qui ne la jugera pas, et qui ne lui fera pas ressentir de culpabilité.
Par ailleurs, consulter un psy permet de se décharger sur le plan émotionnel et c’est très important dans le cadre d’un trouble du comportement alimentaire puisque, nous l’avons vu tout au long de cette interview, la plupart des TCA sont liés à une difficulté à gérer ses émotions et ses relations aux autres.
Un psychologue, spécialiste des troubles du comportement alimentaire ou non, va pouvoir apporter un nouveau regard, objectif, sur cette problématique du TCA.
Le psychologue pourra alors apporter des outils, des solutions, aider à la compréhension, aider à la réflexion, toujours dans un cadre bienveillant et sécurisant.
Peut-on sortir d’un TCA seul ?
Seul c’est très difficile voire impossible quand les troubles sont installés depuis longtemps, d’autant que poussés à leur paroxysme, ils peuvent nécessiter une hospitalisation.
Certains TCA, comme l'anorexie par exemple, peuvent causer la mort des personnes atteintes à un niveau très sévère de ce trouble, donc la prise en charge médicale et psychologique est essentielle quand on veut sortir d'un TCA.
Et puis seul c'est très difficile parce qu'au-delà de la volonté, je dirais qu’il faut avoir envie de travailler sur son trouble de l’alimentation.
Généralement, les personnes qui viennent me consulter ont un réel désir de mettre un terme à la souffrance engendrée par leur TCA.
Elles expriment même très clairement leur volonté à surmonter ce trouble alimentaire pour retrouver l’apaisement. C’est là qu’elles comprennent, après une première séance, que leur souffrance et leur trouble sont légitimes.
C’est un premier pas vers la guérison. En revanche, un patient qui n’a pas envie de travailler sur son TCA ne pourra pas en sortir facilement.
Comment aider une personne qui souffre d’un TCA ?
Il existe plusieurs manières de l'aider :
- Conseil n°1 : L’écouter, le ou la soutenir, ne pas la juger, lui demander de quoi elle a besoin ;
- Conseil n°2 : Dire à une personne qui vous partage son mal-être lié à son trouble de l’alimentation : Qu’est-ce qui te met en souffrance ? Qu’est-ce qui te ferait du bien ? De quoi as-tu besoin ?
- Conseil n°3 : Faire comprendre à la personne qu’elle n’est pas jugée. Elle pourra se défaire du sentiment de culpabilité, se défaire de la honte. Elle pourra arrêter de se cacher, elle pourra lever les non-dits, commencer à en parler dans un climat de confiance ;
- Conseil n°4 : Accepter d'être impuissant face au trouble de l’autre ;
- Conseil n°5 : Se protéger soi-même afin de ne pas se laisser envahir par le trouble du comportement alimentaire au quotidien ;
- Conseil n°6 : Si c’est une personne très proche comme un parent, un enfant ou un conjoint, ne pas hésiter à consulter soi-même un psychologue pour se décharger et se sentir soutenu.
Bon à savoir
Il existe par ailleurs de nombreuses associations favorisant l'entraide et l'expression grâce à des groupes de soutien dans le cadre des troubles des conduites alimentaires.
À qui parler quand on souffre d’un trouble de l’alimentation autour de soi ?
Au départ, vous pouvez en discuter avec un proche en qui vous avez confiance et qui ne vous jugera pas, si vous sentez que cela peut vous aider.
Dans les troubles des conduites alimentaires, il est aussi possible de faire appel à son médecin généraliste en première intention, mais ensuite les professionnels de la santé mentale comme les psy sont des interlocuteurs à privilégier.
L'objectif ici est de prendre la parole sur ce que vous ressentez au moment des crises et de comprendre pourquoi vous les faites, afin de ne plus les reproduire.
L'expression de vos émotions et de vos souffrances doit se faire dans un environnement dans lequel vous vous sentirez en sécurité.
S'il n'est pas simple de s'avouer souffrir d'un trouble de l'alimentation, il est toutefois essentiel d'instaurer un dialogue bienveillant avec vous-même et de garder un lien social avec votre famille, vos amis ou vos collègues de travail et ce, malgré les comportements d'isolement que les troubles provoquent.
En effet, perdues dans le refuge de la nourriture ou dans le strict contrôle alimentaire qu'elles exercent, les personnes souffrant de TCA finissent par perdre le sens des réalités et ne pas avoir conscience de leur propre mal-être.
Pourtant leurs souffrances sont bien réelles et doivent pouvoir être exprimées autrement que par un comportement autodestructeur et aussi inconscient soit-il.
Les TCA ont des conséquences psychologiques et physiques graves qui peuvent impacter durablement votre vie.
En discutant de l'anorexie, de la boulimie ou de l'hyperphagie dont vous-même, souffrez peut-être, vous faites le premier pas vers la guérison.
Quels conseils peux-tu donner aux personnes qui souhaitent s’en sortir ?
- Ne pas se culpabiliser par rapport à son fonctionnement et ce qui est vécu ;
- Prendre conscience que cette souffrance est légitime ;
- Ne pas croire qu’il est “trop tard” car il n’est jamais trop tard pour prendre en charge un trouble du comportement alimentaire (même après 10, 15, 20 ans d’un trouble alimentaire) ;
- Ne pas se fier à ce que l’entourage peut dire, ne pas prendre pour acquis les expériences des autres, il n’y a pas de règles, un TCA est très personnel. Ce qui marche pour quelqu’un ne marche pas forcément pour soi ;
- Ne pas avoir honte d’en parler à un psychologue, se rappeler que son métier est d’écouter ;
- Ne pas s’enfermer dans la fatalité en pensant que cela ne pourra jamais changer : nos patients sont la preuve qu’il existe des issues heureuses à un trouble du comportement alimentaire.
À retenir
Si après la réalisation de notre test TCA ou la lecture de cet article, vous avez pris conscience d’un trouble du comportement alimentaire, rassurez-vous : vous êtes au bon endroit.
Que votre trouble soit de la boulimie, de l’hyperphagie, de l’orthorexie ou encore de l’anorexie, nous avons développé, avec notre psychologue spécialiste des troubles du comportement alimentaire, de nombreux contenus et programmes destinés à vous aider. Pour commencer, sachez que des centaines de personnes ont franchi le pas d’une thérapie digitale pour mettre un terme à leur trouble de l’alimentation.
Le plus difficile, comme toujours, est de commencer.
Aussi variés qu'ils soient, les troubles des conduites alimentaire (TCA) peuvent se soigner et il est tout à fait possible d'en sortir définitivement.