Suis-je dans un deuil difficile ?
Vous avez l’impression d’être bloqué dans une des phases du deuil, et vous n’arrivez pas à vous en sortir ?
D’où provient le sentiment de culpabilité après un suicide ?
Le suicide d’un parent entraîne un traumatisme, accompagné parfois d’un sentiment de culpabilité chez l’enfant, qui pense avoir une part de responsabilité dans cet acte.
Envahi par des pensées angoissantes et des flashbacks insupportables (parfois symptômes d’un état de stress post-traumatique), il aura tendance à se tourmenter sur ce qui aurait pu être fait pour éviter la ou les tentatives de suicide, et à s'en vouloir de ne pas avoir réussi à détecter les signaux avant-coureurs, afin d’offrir un soutien adéquat.
Ce sont ces pensées rétrospectives qui génèrent un sentiment de responsabilité personnelle quant à ce drame. Elles alimentent ce que l’on appelle le syndrome du survivant : l’enfant a la perception d’avoir échoué dans son rôle. Il se sent coupable de ne pas avoir été assez présent, aimant et attentionné pour empêcher ce geste, et s’en veut de ne pas avoir perçu la détresse émotionnelle de son parent pour le sauver.
En outre, on observe encore aujourd’hui une certaine stigmatisation qui entoure le suicide. Il subsiste cette idée préconçue que les proches du disparu étaient les mieux placés pour reconnaitre les signes alarmants et empêcher le suicide. Cette pression sociale négative est un réel facteur d’amplification de cette culpabilité.
Cette dernière est difficile à porter au quotidien. La personne qui est atteinte d’une culpabilité du survivant peut souffrir d’une fatigue intense (voire d’une asthénie), de troubles du sommeil, d’anxiété, de sautes d’humeurs et de troubles psychologiques comme des épisodes dépressifs qui la poussent à se retirer peu à peu des activités sociales.
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Comment se remettre du suicide d’un parent ?
Étape inévitable dans la vie de chaque être humain, le deuil est parfois plus difficile à vivre lorsque la mort est inattendue et violente. Lorsqu’un parent décide de mettre fin à sa vie, il est possible de ressentir de la détresse, du soulagement, du désespoir, du chagrin… Difficile alors de se retrouver dans les étapes classiques du deuil.
Parfois, la perte d’un parent d’une manière aussi inattendue déclenche le trouble de stress post-traumatique (TSPT), état d’anxiété sévère vécu à la suite d’un événement particulièrement traumatisant.
Alors, comment réussir à se relever après le suicide d’un parent ? La Clinique E-Santé vous délivre ses 9 conseils pour réussir à traverser cette douloureuse épreuve :
- Chercher du soutien
- Accepter ses émotions
- Ne pas se blâmer
- Être patient avec soi
- Prendre soin de son corps
- Honorer la mémoire du parent
- Éviter l’isolement
- Prendre soin de son mental
- Établir de nouvelles routines
Conseil n°1 : chercher du soutien
Après le suicide d’un parent, il est crucial de chercher du soutien afin de ne pas traverser cette perte traumatique seul et isolé. Le deuil qui en découle peut être accablant, complexe et générer une multitude d’émotions intenses. Le soutien social permet aux survivants en deuil de partager leur douleur, de se sentir compris et entourés pendant cette épreuve.
Plusieurs ressources de soutien pour le deuil sont accessibles pour dépasser un suicide. Les professionnels de la santé mentale, psychologues ou psychiatres, peuvent offrir une aide précieuse avec des ressources pour comprendre et apprivoiser ses propres émotions et ses réactions afin de retrouver un réel équilibre émotionnel.
Les groupes de soutien et les lignes d’écoute spécifiques au deuil proposent un espace bienveillant pour partager son expérience avec des personnes qui peuvent avoir un ressenti similaire.
Enfin, les proches sont une source précieuse de réconfort et de soutien émotionnel. Parler de ses émotions, faire part de son sentiment d’abandon et de sa souffrance en tant que survivant est souvent libérateur.
Conseil n°2 : accepter ses émotions
Un deuil compliqué peut déclencher des émotions ambivalentes telles que la tristesse profonde, le choc, le déni, la colère, le soulagement, la confusion, la culpabilité, etc. Lorsque ces émotions intenses émergent, il est difficile de toutes les accepter, surtout celles dont on ne parle pas lorsqu’il est question de deuil, comme le soulagement.
Il est important de se donner la permission de ressentir ces émotions, tant positives que négatives, sans se juger. Chacune de ces réactions est valide et naturelle face à une perte aussi traumatisante. Au contraire, tenter de supprimer ou de refouler ces dernières peut entraver le processus de deuil et prolonger la souffrance.
Il est essentiel de s’autoriser à pleurer, d’exprimer sa colère et de partager sa confusion sans se sentir coupable ou honteux.
L’art-thérapie est, à titre d’exemple, une méthode douce et reconnue qui permet une véritable expression émotionnelle grâce à la création.
Conseil n°3 : ne pas se blâmer
Lorsqu’un parent se suicide, il est fréquent que les survivants ressentent un poids écrasant de culpabilité. Mais il est essentiel de comprendre que la responsabilité du choix de l’être perdu de mettre fin à sa vie n’incombe qu'à lui-même. Ne pas se blâmer est une étape cruciale dans le processus de guérison, puisque cette culpabilité empêche de passer à l’étape de l’acceptation.
Le sentiment de stigmatisation qu’éprouve le survivant du suicide d’un proche altère son estime de soi. Il a l’impression de ne pas avoir fait assez d’efforts pour éviter cet acte, et se sent coupable.
La culpabilité peut engendrer des pensées telles que : “J’aurais pu faire ceci” ou encore “Si j’avais su…”. Ces pensées entraînent souvent de l’auto-flagellation, qui entrave le processus de reconstruction. Mais le suicide est un acte complexe qui résulte de multiples facteurs individuels et de circonstances qui échappent, la plupart du temps, au contrôle des autres.
Pour dépasser ce ressenti, il est important de développer l’amour de soi et l’empathie envers soi-même. Le soutien d’un professionnel de la santé mentale et / ou des proches peut être précieux à ce moment, pour comprendre sa position de victime dans ce drame.
Conseil n°4 : être patient avec soi
Le deuil est une période remplie d’émotions intenses, de confusion et de bouleversements émotionnels. Chaque personne traverse le deuil à son propre rythme : certains atteignent rapidement l’acceptation, quand d’autres se sentent bloqués à l’étape du choc. Il est essentiel de se donner le temps et l’espace nécessaires pour guérir d’un traumatisme complexe comme celui-ci.
Faire son deuil, c’est passer par un processus non linéaire, ponctué par des jours heureux, et d’autres, où la douleur paraît littéralement écrasante. Ces hauts et bas émotionnels sont une réalité normale ! Il est important d’être patient avec soi, de faire preuve de résilience, et d’avoir confiance en ce processus qui mène à la compréhension, à l’adaptation et enfin à l’acceptation de ce drame.
Il est important de ne pas comparer son deuil à celui des autres, ou de s’imposer des attentes ou un délai quant à celui-ci. Chaque personne qui traverse cette étape a besoin d’un temps qui lui est propre, d’intégrer ou non des techniques d’autosoins, de faire une thérapie de deuil, d’avoir recours à des interventions postventionnelles (outils de soutien apportés aux personnes en deuil, afin d’aider à faire face aux conséquences émotionnelles et psychologiques de la perte) ou tout simplement de prendre du temps seul pour se reconstruire. Pendant cette période, la patience est une alliée !
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Conseil n°5 : prendre soin de son corps
Les effets du stress prolongé sont importants, tant psychiquement que physiquement. Pour cette raison, il est important de faire attention à sa forme physique dans une période aussi particulière.
Réussir à dépasser un deuil nécessite une réelle évolution personnelle, d’une part à travers les différentes étapes du deuil, mais aussi en passant par une reconnexion à ses propres besoins physiques et psychiques.
Pour prendre soin de son corps, il peut être intéressant de se focaliser sur 3 piliers fondamentaux :
L’alimentation : maintenir une alimentation équilibrée est essentiel. Manger des aliments nutritifs et riches en vitamines aide à maintenir une bonne énergie et favorise une bonne santé globale.
Le sommeil : bien dormir est crucial pour la santé physique, mais aussi pour la régulation émotionnelle. Établir une routine de sommeil régulière aide à garder des repères et de l’énergie pendant cette période.
L’activité physique : pratiquer un sport régulièrement peut être intéressant pour traverser le deuil plus sereinement. Le yoga, la course à pied ou la natation sont des disciplines qui permettent de se ressourcer, en plus d’activer les hormones du bonheur.
Conseil n°6 : honorer la mémoire du parent
Afin de faciliter le processus de deuil et d'apprendre à vivre avec la perte d’un être cher, il peut être intéressant de lui dédier un moment, un rituel, ou d’effectuer toute autre action qui permettra de garder le lien malgré la douleur de sa perte.
C’est une étape qui n’est pas effectuée par toutes les personnes en deuil, mais elle reste parfois nécessaire pour accepter le choix du défunt, conscientiser la situation, et progressivement se remettre en action après cette période de choc.
Il est possible d’honorer la mémoire du parent de différentes façons. Partager des souvenirs et des histoires liées au parent lors de rencontres familiales ou de réunions avec certains proches aide à se remémorer les moments spéciaux vécus ensemble. La mise en place d’un espace dédié à cette personne, avec des photos et des mots, offre la possibilité à tous de se recueillir et de se connecter avec des souvenirs heureux.
Faire porter sa voix, notamment en contribuant à une cause qui était chère au parent, est une manière significative de lui rendre hommage. Créer une association, faire des dons, s’impliquer dans des actions bénévoles… Les possibilités sont nombreuses pour continuer à faire vivre un combat qui était important pour la personne qui est partie.
Enfin, il est tout à fait possible d’honorer la mémoire de son parent de manière plus intime. Écrire une lettre, tenir un journal de bord, porter un de ses bijoux, lui dédier un moment dans la journée… Il existe des multitudes de façons de lui rendre hommage !
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Conseil n°7 : éviter l’isolement
L’isolement est une réaction courante après le suicide d’un parent. C’est une tragédie qui engendre une profonde douleur et une telle confusion émotionnelle qu’elle pousse certaines personnes à se replier sur elles-mêmes.
S’isoler après un décès d’un proche est une réaction tout à fait normale : il est important de prendre le temps de se recueillir et de se retrouver seul avec soi-même pour prendre conscience des événements.
Cependant, l’isolement peut aussi être synonyme d’évitement émotionnel. Tout ce qui est relatif à la personne perdue est strictement évité : certains endroits, des personnes, ou encore des routines communes… C’est à ce moment que l’écart avec les autres commence à se creuser, et peut se maintenir sur le long terme avec le développement d’une réelle anxiété sociale.
Afin d’éviter l’isolement, il est important de maintenir la communication avec les proches, parler de ses ressentis et partager ses émotions. La famille, les amis, les collègues ou les lignes d’écoute peuvent être des espaces sûrs pour s’exprimer et continuer à garder un lien avec l’extérieur.
Conseil n°8 : prendre soin de son mental
Perdre un parent est une épreuve qui marque un réel tournant dans la vie de l’enfant. Instantanément, on remarque une perte de repères et un besoin de reconstruction de l’identité, qui a été profondément marquée et changée par ce drame.
L’apparition de troubles de l’humeur et le risque de suicide sont plus importants chez les personnes qui viennent de perdre un parent. C’est un moment où l’estime de soi est au plus bas, à cause de la culpabilité ressentie. Le choc émotionnel causé par cet événement, provoque lui aussi des effets négatifs dans le cerveau : libération d’hormones du stress, dérégulation émotionnelle, etc.
Il est alors primordial de réserver du temps pour prendre soin de sa santé mentale, particulièrement mise à mal par le traumatisme et la culpabilité. Se rapprocher d’un psychologue peut être une solution pour se libérer de cette forte charge émotionnelle, et comprendre les mécanismes derrière certaines émotions ressenties.
Parmi les différentes méthodes thérapeutiques appliquées par les psychologues, certaines sont particulièrement recommandées pour traverser un deuil : la thérapie familiale, l’EMDR, l’analyse systémique et la thérapie cognitivo-comportementale.
Conseil n°9 : établir de nouvelles routines
La mise en place de nouvelles routines est généralement un élément essentiel dans le processus de guérison. Puisque la perte d’un parent entraîne un bouleversement considérable dans la routine quotidienne de la famille, cela crée un sentiment de déséquilibre et d’incertitude. Mettre en place de nouvelles routines peut aider à apporter de la stabilité et à favoriser le retour d’un bon équilibre émotionnel.
Parfois, certaines personnes en deuil se réfugient dans le travail et deviennent de vrais addicts au travail, au risque de s’engouffrer dans un véritable surmenage professionnel. D’autres, se retrouvent complètement désemparées et, au contraire, n’arrivent plus à gérer le quotidien.
Une période de deuil entraîne forcément des remaniements dans le quotidien, et peut donc être une opportunité pour réévaluer ses besoins, ses responsabilités, ses priorités, et se fixer de nouveaux objectifs tout en intégrant des activités liées au bien-être mental afin de trouver un équilibre satisfaisant et sain.
En outre, le réaménagement de l’emploi du temps aide à traverser plus sereinement cette période. Certaines anciennes habitudes qui provoquent, aujourd’hui, un chagrin peuvent être abandonnées, tandis que des nouvelles, plus ajustées, peuvent être adoptées.
Le saviez-vous ?
Les personnes qui ont perdu un être cher traversent généralement 5 grandes étapes. Celles-ci ont été théorisées en 1969 par Elisabeth Kübler-Ross, psychiatre américaine, qui a été inspirée par ses travaux sur les patients en phase terminale d’une maladie :
- Le déni
- La colère
- La négociation
- La tristesse
- L’acceptation
Mais attention, chaque deuil est unique ! Certaines personnes passeront par toutes les étapes du deuil de façon linéaire, tandis que d’autres pourront l’expérimenter d’une autre manière, ou sauter certaines étapes. Dans le cas d’un suicide, le deuil est plus souvent traumatique et complexe. Ces phases peuvent être alors complètement bouleversées.
Le rôle du soutien social
Le deuil est une aventure difficile qui mobilise beaucoup d’énergie psychique. Lorsqu’il survient très tôt dans l’enfance, il peut interférer avec le processus de développement du cerveau. Plus tard, il peut également être le point de départ d’un attachement ambivalent, de troubles anxieux, du développement d’une peur de l’abandon (qui, parfois, engendre une véritable dépendance amoureuse dans le couple) ou encore de comportements addictifs.
Lorsqu’un parent part brutalement, il laisse un vide et une peine qui semblent impossibles à surmonter. Parfois, on observe un certain déni de l’événement ou un comportement d’évitement, par peur du malaise ou d’importuner. Mais il est important de dépasser cet aspect tabou du sujet de la mort, et plus particulièrement du suicide, qui est souvent difficile à porter pour les survivants.
Le soutien social est alors primordial pour surmonter cette peine, et les émotions négatives qui en découlent. Il permet d’apporter un véritable réconfort aux personnes endeuillées et submergées par la peine. Leur laisser la place de se sentir écoutées et soutenues leur permet généralement de traverser ce processus de guérison en confiance, et donc plus sereinement.
Les groupes de soutien, les amis, la famille et les professionnels de la santé mentale peuvent fournir un environnement sécurisant où les survivants peuvent exprimer leurs émotions, se délester du poids de la culpabilité, obtenir des conseils et trouver des ressources pour se reconstruire et trouver la paix intérieure.
A retenir
Le suicide d’un parent est une véritable épreuve pour son enfant. Profondément peiné par la perte d’un être cher à ses yeux, il risque de se sentir coupable de la disparition, traumatisé par la situation, et complètement déboussolé par ses émotions.
Afin de traverser cette période si particulière, voici 9 conseils à appliquer :
- Chercher du soutien
- Accepter ses émotions
- Ne pas se blâmer
- Être patient avec soi
- Prendre soin de son corps
- Honorer la mémoire du parent
- Éviter l’isolement
- Prendre soin de son mental
- Établir de nouvelles routines
La communication et le soutien social sont des clés qui permettent de surmonter le sentiment de culpabilité, de comprendre ce qui a causé le traumatisme et de se remettre doucement de l’épuisement émotionnel qu’a engendré ce drame. Amis, famille ou psychologue… il est important de s’entourer !
Sources
Cécile Paesmans, “Les enfants en deuil par suicide”, Études sur la mort, 2005
Lapeint, “Le suicide d’un parent”, 2019
Esile, Perdre un parent d’un suicide, 2023